Prénoms : Jude, Light
Date de naissance : 20/10/2000
Nationalité & origine : Néerlandais & Irlandais
Sexualité : Hétéro
Groupe : O+... Euh... Eindhoven
Rang : Lieutenant
Travail : Thanatopracteur
Zone de résidence : Dans une péniche rénovée, sur les voies navigables
Caractère
OK, THIS IS AWKWARD
Jude est quelqu'un de profondément réservé. Mais cette facette de sa personnalité a tendance à s'exprimer d'une manière bien différente de l'excès de silence et de timidité que l'on peut en attendre. Il démontre sa réserve sous forme de mensonges divers et variés concernant sa personne. Si vous rencontrez 15 individus différents ayant eu affaire à lui, vous aurez 15 versions différentes le concernant. En vérité, il déteste parler de lui et a décidé de s'en amuser. Oui, l'irlandais est quelqu'un de plutôt enjoué sous ses airs de force tranquille... surtout lorsqu'il s'agit de semer le trouble et de perturber son interlocuteur. Il n'a pas une nature de manipulateur, mais aime susciter des réactions chez ceux qu'il a en face dans les moments d'ennui.
Monsieur O'Brien est d'un naturel patient et observateur. Il sait néanmoins être intransigeant dans sa vie professionnelle. Il gère son entreprise "O'Brien - Balsemen sinds 1857" d'une main de fer, et ne tolère ni la paresse, ni les écarts. L'excellence est son crédo, hors de question de voir sa réputation et le poids historique de son nom à New Amsterdam être taché par de l'incompétence. Il ne s'autorise à se relâcher qu'en dehors de son business. Plutôt solitaire, il en profitera alors pour dévorer un bon livre en sirotant un thé dans un café quelconque... ou à aller se délecter de ce qu'il peut trouver d'art autour de lui. A défaut, il aime s'installer quelque part pour faire des croquis, comme pour capturer l'éphémère à la seule force de son fusain. Du détail au paysage, de l'individu au plus insignifiant insecte, tout y passe tant que son attention est retenue. Les scènes chaotiques des rues nocturnes infréquentables sont sa dose de frisson, il n'hésite des fois pas à se mettre en danger pour pouvoir immortaliser la violence dont il est témoin.
Laconique, il est probable que vous vous retrouviez soudainement en plein festival du vent au pays du Zéphir. Lorsque Jude estime qu'il est inutile de vous répondre, il ne vous répondra pas, point. Ses silences peuvent être aussi caustiques que ses répliques parfois bien trop franches. En effet, si monsieur ne se livre que très peu à son sujet, il ne se privera pas de faire part d'une opinion souvent non sollicitée à son prochain. Sa personnalité dichotomique et ambigüe font de lui un individu surprenant et parfois difficile à appréhender. Jude en a conscience, mais ne cherche en rien à faire des efforts. S'il décide de vous laisser entrer dans son cercle proche, vous le saurez bien assez tôt.
Pour en découvrir plus sur ce qu'il cache et vous faire une idée plus large de cet étrange irlandais, je vous invite à lire son histoire. Notamment les chapitres 4 et 5. Voilà, moult poutous à vous.
BO-BO-BONUS
Jude a adopté un chiot qui a aujourd'hui 6 mois. Il s'agit d'un Dogue Allemand blanc taché de noir qu'il a appelé Dot. Il le traîne absolument partout avec lui, et doit constamment se retenir de ne pas gagatiser publiquement, au risque de pourrir son image. Sur sa péniche par contre... allez savoir qui du chien ou du maître colle le plus l'autre. Ces deux-là font la paire : calme légendaire, grosse tendance à la sieste, curiosité silencieuse, goût pour le grand air... Dot est également un fin gourmet, tout comme Jude - qui possède d'ailleurs un certain talent pour la cuisine. Quiconque arrivera à mettre la main sur ses carnets de croquis se rendra rapidement compte que, dernièrement, il y a bien plus de portraits du chien qu'autre chose à l'intérieur.
N.B. : Jude aime les scalpels, et sait s'en servir. Son préféré ? Manche 4 avec une lame de 23. Souple et élégante. Parfaite pour des découpes inopinées.
RESTING BITCH FACE : ON
Monsieur est grand, très grand. Il culmine à 1 mètre et 98 centimètres. S'il devait être vraiment précis, Jude ajouterait "et 2 millimètres 3 quarts". Mais Jude étant Jude... il garderait certainement ce détail pour lui. Ses deux parents étaient déjà des perches, sans parler des autres ancêtres O'Brien. Son père faisait la même taille que lui, et sa mère dépassait le mètre quatre-vingt. Difficile donc pour le jeune irlandais de ne pas jouer les asperges à son tour. Il n'est pas très lourd pour sa taille et pèse environ 80kg (même si ça fait un bail qu'il ne s'est pas pesé). Il a une morphologie plutôt fine et un métabolisme qui lui permet les excès sans en subir les conséquences.
La première chose qui frappe chez l'irlandais, ce sont ses mains ce sont ses yeux. Excentrique comme pas deux, Jude s'est fait tatouer le blanc de l'œil en noir et a usé de keratopigmentation pour colorer son iris en rouge. Pourquoi ? Parce qu'il voit son corps comme un outil d'expression, d'expérimentation. Lui qui travaille sans cesse avec la mort entre les doigts, aime à profiter de son vivant pour pouvoir essayer tout ce qui lui passe par la tête. Et autant dire qu'avec ce qu'il gagne en bossant pour les Eindhoven, il peut très largement se le permettre. Les tatouages qui ornent sa peau proviennent de l'application de la même logique. Il n'y a pas que sur la face des défunts que Jude aime s'appliquer à exercer l'art. Les dessins qu'il crée à ses heures perdues, il les fait encrer sous sa peau souvent sur un coup de tête.
Tout est prétexte à s'amuser, à choquer, à déranger, à dénoter. Pourquoi ressembler à tout le monde ? Jude s'est aussi orné d'un tas de piercings au fil du temps. Oreilles, lèvre, arcade... Il a d'ailleurs un jour décidé de se faire retirer les sourcils au laser, et ne le regrette absolument pas. Ses vêtements vont de paire avec ses excentricités. Il ne se prive pas pour porter des tenues de créateurs, mais est aussi tout à fait capable de passer sa vie en sarouel / t-shirt si la flemme le vainc. Tout dépend de l'influence qu'il veut avoir, de l'image qu'il veut donner.
La crinière de jais souple et soyeuse qu'il arbore est un sujet de fierté, mais ça ne l'empêche pas de se raser le côté du crâne de manière disciplinée. Il porte généralement ses cheveux relevés dans un chignon désordonné, même si quelques mèches dégradées en tombent régulièrement.
La gestuelle de Jude va de paire avec son caractère. Il a généralement une aura calme, accentuée par la manière silencieuse et souple qu'il a de se mouvoir. Dos droit, pas légers, il n'a aucune honte de sa taille et ne tient en rien à la cacher. Il joue de sa finesse et de son corps élancé pour émaner autour de lui quelque chose de félin, comme un prédateur près à sortir les griffes au moment où on s'y attend le moins. Observateur, ses grandes iris rouges ne manquent pas de scruter son entourage dans les moindres détails, lui donnant l'impression de très peu cligner des yeux par rapport au commun des mortels. Etrange jusqu'au bout des ongles, il ne fait pas partie des personnes qui ont pour habitude de mettre à l'aise... et il en joue, notamment par son inexpressivité. Difficile de savoir ce qu'il pense, l'animal.
ONCE UPON A TERRIBLE TIME
CHAPITRE UN : 1845
Les ventres sont creux sur le territoire irlandais. L'arrivée d'un terrible fléau pour le tubercule adoré de tout bon irlandais du 19ème siècle, le mildiou, ravage chaque petit coin de champ. Tout devient noir, les esprits comme les cultures, les humeurs comme les pommes de terre. Cette étrange marée d'ébène aura poussé bien des familles à quitter leur terre natale. Tentative désespérée pour sauver quelques biens, un peu de dignité et d'existence. Les O'Brien en font bien évidemment partie. Au diable leur landlord, au diable leurs cultures, il n'y a que la survie qui compte. Ils n'ont pas attendu de savoir si la situation allait durer pour fuir, ils n'ont pas attendu qu'on puisse leur proposer quelconque solution. Pourquoi compter sur les politiques, quand ils ont eux-mêmes participé à votre ruine ? Alors, dès le printemps 1845, par une nuit plutôt fraîche, la tribu O'Brien prit le large. Père, mère, enfants, pas un seul ne manquait à l'appel au moment de monter sur le voilier qui les attendait. Quelle chance d'avoir des pécheurs pour connaissances. Quelle chance d'habiter sur la côte, non loin de Dublin. Emmitouflés, aucune lampe allumée, les voilà qui voguent sur la Mer d'Irlande en direction de la Grande-Bretagne.
La traversée discrète s'effectua sans encombre. Les prévisions sommes toutes empiriques concernant une météo calme et favorable se confirmèrent. Les O'Brien posèrent le pied sur la terre ferme, l'espoir naissant d'une vie renouvelée. Le bateau de pêche repartit silencieusement, les laissant sur le rivage sans un mot après qu'une bourse de ce qu'il leur restait d'économies ait été déposée sur la paume de leur passeur. Ce dernier s'en allait refaire affaire, continuer d'augmenter le poids de son trésor avant de lui-même s'évader. Les irlandais fraîchement débarqués pensaient que leur première nuit serait la plus dure, ils avaient assurément tort. La vague d'immigration provoquée par la famine n'avait fait qu'attiser la colère des britanniques. Les O'Brien n'étaient pas les bienvenus. Plus ils avançaient dans les terres, plus on les chassait. D'aumône en aumône, de misère en misère, de travail ingrat en travail ingrat... les voilà qui se retrouvèrent coincés à Southend-on-Sea, face à la Mer du Nord.
Plus de solution, c'est le cul de sac, les poches vides, le moral dans les chaussettes. La petite famille se regarde dans le blanc des yeux sans qu'aucun ne soit seulement capable d'évoquer une idée. Les jours passent où, désormais habitués à ravaler leur fierté, ils mendient sur le port en attendant qu'une âme charitable ne se tourne vers eux. Lorsque ce moment arriva, il s'avéra que la charité n'était pas l'atout principal de l'âme en question. On proposa aux O'Brien une traversée vers un pays qui accepterait visiblement de les accueillir, eux, ces parasites d'irlandais. La seule condition pour que le miracle opère était de leur laisser leur fils aîné comme main d'œuvre sur les docks. Les regards désespérés de parents acculés se tournèrent vers le jeune homme en question, qui accepta sans discuter. "Au moins, j'aurai un travail, et vous une opportunité" avait-il dit. Le sacrifice fut accepté à contrecœur, des étreintes tristes furent échangées, et le restant de la famille O'Brien monta à bord d'un bateau à vapeur, bien cachée dans la cale, entre les marchandises.
CHAPITRE DEUX : AMICI MORTIS
C'est ainsi que les ancêtres de Jude finirent pas poser le pied aux Pays-Bas, au port d'Amsterdam, la mort à l'âme et au cœur d'avoir dû briser leur famille pour espérer tous survivre. Debout sur les docks, ils fixaient le large dans l'espoir de voir la main de leur fils s'agiter par-delà la Mer du Nord, en vain. Symboliquement, madame O'Brien envoya un baiser au large avant de suivre sa tribu qui s'avançait dans les rues bondées. Il leur fallait désormais trouver un travail, un moyen de subsistance sur cette terre nouvelle où l'espérance était permise. Leur bonne volonté comme atout majeur, les irlandais ne tardèrent pas à trouver un emploi comme nettoyeurs de tombes, généreusement confié par les religieux locaux. Logés au presbytère, les bonnes sœurs avaient accepté de garder les enfants en attendant que la famille ait de quoi se payer un toit. Il ne fallut que quelques mois de travail sérieux et acharné pour gagner la confiance des locaux. Les O'Brien se virent alors attribuer la tâche d'assister l'inhumation des morts.
Les années passèrent, la famille irlandaise parvint à retrouver son indépendance. Leurs enfants grandirent, et le plus âgé de la fratrie se vit proposer d'apprendre à embaumer les morts. En effet, le "balsemer" local - ou bien plus explicitement "embaumeur" - n'allait pas tarder à prendre sa retraite et cherchait quelqu'un pour être la relève de son activité. Malheureusement sans progéniture, on lui avait confié que de fiables et respectables irlandais auraient bientôt un garçon en âge d'apprendre un métier. Le balsemer n'avait pas pour habitude de privilégier les étrangers aux natifs, mais se décida tout de même à lui laisser une chance après que la Sœur responsable du presbytère lui ait encore chanté leurs louanges. Un entretien méticuleux fut organisé, des tests en concurrence avec quelques bons néerlandais également. Le résultat fut sans appel : le jeune O'Brien avait le talent, le sang-froid et le calme nécessaire pour devenir apprenti. Il s'était très nettement démarqué des autres candidats.
L'avenir fut tout tracé pour la relève irlandaise. Après un cursus réussi avec brio et une carrière bien lancée (accompagnée d'une réputation sans faille), Monsieur O'Brien se décida à racheter l'entreprise à son maître en 1857. Depuis, les murs passent de génération en génération avec un dévouement inchangé. A croire que les morts d'Amsterdam et alentours ne peuvent plus se passer de leur nom désormais. La tribu d'immigrés aura fait un chemin colossal depuis leur arrivée inopinée sur le territoire. Elle aura gagné le respect des amstellodamiens à la sueur de leurs fronts et à leur discrétion sans faille. L'image de marque de l'affaire "O'Brien - Balsemen sinds 1857" reste inchangée jusqu'à l'heure où vous lisez ces lignes, et cela, malgré bien des vagues et tempêtes pour tenter de les ébranler.
CHAPITRE TROIS : L'APOCALYPSE
Avant les grandes inondations de 2012, notre cher Jude avait grandi dans l'optique de devenir médecin légiste. Non pas qu'il n'apprécie pas l'art d'embaumer les morts, mais il lui avait semblé utile de chercher plus loin et de reprendre l'affaire familiale plus tard, au moment de la retraite de ses parents. N'y voyant aucun inconvénient, monsieur et madame O'Brien avaient laissé champ libre à leur fils de suivre ses lubies et passions. Ils savaient pertinemment que son goût pour la médecine était un fruit de sa grande curiosité, et non pas une volonté de rébellion contre la tradition familiale. Mais les eaux envahissantes et apocalyptiques de l'année 2012 vinrent chambouler tous les plans bien établis de la famille irlandaise. Jude se vit contraint d'interrompre sa scolarité brutalement, incapable de savoir quand il serait à nouveau à même de recevoir une éducation. Tout fut stoppé net dans la capitale, et les énergies de chacun furent déployées à reconstruire tant bien que mal.
Désespérés de voir l'œuvre d'une vie disparaître dans l'abysse, les O'Brien se mirent à faire ce pour quoi ils étaient doués : traiter avec les morts. Ils travaillèrent d'arrache pied pour aider les familles endeuillées à honorer leurs défunts, et également à faire en sorte que des épidémies ne viennent pas en plus parfaire le travail des inondations. Les Eindhoven ne tardèrent pas à les approcher. La proposition était simple : travailler pour eux, récupérer les organes des corps embaumés en échange d'argent et d'un nouveau toit sur leur territoire. Dans le chaos général qui suivit la catastrophe naturelle, bénéficier de la protection d'une puissante famille comme les Eindhoven était un atout non négligeable. C'est donc sous couvert de secret que les O'Brien ont commencé à mettre à profit leurs talents d'une manière toute nouvelle. Ils furent placés sous la surveillance d'un capo, jusqu'en juin 2013, afin de déterminer s'ils étaient dignes de confiance. Travaillant dans les locaux mis à leur disposition sous leur identité historique : "O'Brien - Balsemen sinds 1857", la thanatopraxie comme masque acceptable à leurs sombres pratiques.
Les parents de Jude passèrent lieutenants dès le départ du capo, à présent en confiance avec leurs patrons. Le jeune O'Brien décida de reprendre sa scolarité et de raviver sa passion pour la médecine, s'éloignant pour s'instruire à Utrecht, zone non touchée par les flots. Même si Amsterdam n'était pas encore remise de toutes ses blessures, la vie reprenait sûrement son cours. Pour les O'Brien, la situation aurait pu être bien pire. Quelle aubaine pour les deux partis, mafia et civils, d'avoir su s'entendre pour mieux se relever. Les irlandais vouent à cette période une loyauté sans faille aux Eindhoven, grandement motivée par leur dépendance financière et l'aspect lucratif du trafic d'organes. Après tout, qu'y avait-il de si terrible à permettre un certain accès à la santé dans un contexte dramatique ? De belles œillères pour une famille qui cherche à ne pas être rongée par les scrupules.
CHAPITRE QUATRE : RETOUR FORCÉ
Quelle passionnante épopée que celle des études supérieures ! Epopée qui fut malheureusement écourtée en cours de dernière année de spécialisation pour Jude. A croire que le destin s'acharnait à tout faire pour ne pas lui permettre de réaliser son rêve d'être légiste. Les Eindhoven l'avaient appelé en lui expliquant que ses parents n'étaient plus en état de travailler et qu'il devait revenir à Amsterdam. Bien évidemment, le jeune homme souleva la question qui fâche : pourquoi ? La réponse ne lui plut absolument pas. Son père s'était fait descendre, et sa mère était dans un état critique à l'hôpital. A contrecœur, mais sans hésitation, Jude quitta l'université pour revenir dans sa ville natale. La mine sombre, il se posait mille et une questions. On ne lui avait pas donné beaucoup de détails au téléphone, comme il était de coutume. Il n'avait aucune idée réelle de ce qui était arrivé à ses parents.
L'urgence était d'aller voir sa mère. A son chevet, il l'observait d'un air grave dans son fauteuil. Coudes posés sur ses genoux, mains jointes sur lesquelles reposait le bas de son visage, il écoutait attentivement ce que le médecin était en train de lui énoncer :
"Elle a reçu une balle dans l'épaule et l'autre dans le genou. Mais ce sont surtout les coups qu'on lui a porté par après, au niveau du crâne et du dos, qui ont causé le plus de dommages. Elle ne se réveille pour l'instant pas, mais nous restons optimistes. Ses lésions se résorbent petit à petit, les sutures guérissent bien. Mais...
- Mais... ? Interrompit Jude, plantant ses yeux verts dans ceux du médecin.
- Mais sa colonne vertébrale a été sévèrement touchée, elle ne sera certainement pas en mesure de marcher à son réveil. Nous ne savons pas non plus quels sont les dommages cognitifs qui lui ont été infligés. Il faut attendre son réveil.
- Je vois. Pouvez-vous me laisser seul avec elle ?
- Bien sûr. N'hésitez pas à appeler une infirmière en cas de besoin."
Une fois le médecin sortit de la pièce, la porte close, Jude sortit son téléphone de sa poche et contacta immédiatement son intermédiaire chez les Eindhoven. Il avait besoin de savoir, il avait besoin de comprendre exactement ce qu'il s'était passé. On finit par lui donner le nom d'une personne avec qui entrer en contact, et qui se chargerait de lui expliquer tout ce qu'il savait. L'appel terminé, le jeune homme à la peau d'albâtre prit la main de sa mère entre ses doigts fins. Il la porta à ses lèvres et y déposa un baiser. Il resta longtemps, à en caresser le dos du pouce alors qu'il la regardait dormir. Elle avait l'air si paisible malgré son visage tuméfié... Lui se sentait simplement extrêmement seul. Ce sentiment vint lui tordre l'estomac, et il sentit une larme rouler sur sa joue. Jude l'essuya de sa main libre et promit alors : "Je vais prendre soin de toi. Je ferai tout ce qu'il faut pour ça. Ne t'inquiètes pas tout ira bien."
Quelques jours plus tard eurent lieu les obsèques de son père. Son cœur se fit encore plus lourd ce jour là, mais étonnamment, il ne versa aucune larme. Jude se sentait simplement vide et las. D'autant qu'il avait appris la veille, que le sort de ses parents avaient été décidé par deux jeunes imbéciles, imbibés d'il ne savait quelle substance et armés. Ils avaient visiblement menacé ses parents, leur avait pris leur argent et leurs bijoux... avant de finalement décider de les descendre pour le fun. Le témoin qui lui avait parlé se souvenait encore des rires gras et euphoriques des deux jeunes hommes alors qu'ils partaient en courant après avoir mis une balle dans la tête de son père et roué de coups sa mère une fois la peau trouée.
CHAPITRE CINQ : MASCARADE
Jude se remit rapidement au travail suite à son drame familial, ayant repris les reines dès 2025. Après tout, le bazar administratif provoqué par l'absence soudaine de ses parents avait au moins le mérite de l'empêcher de sombrer dans la tristesse. On fit passer le jeune homme lieutenant du haut de ses 25 ans, et son caractère intransigeant ne manqua pas de lui valoir le respect de ses collaborateurs. Froid, distant, pragmatique et factuel, on le sait fiable mais aussi redoutable en cas de faux pas. Cette attitude cacherait-elle un soupçon d'amertume d'avoir perdu son rêve, sa famille et sa liberté à cause de l'influence des familles sur Amsterdam ? Peut-être. En tout cas, à défaut de faire des dessins d'anatomie, le fusain de Jude fut employé à libérer sa frustration et sa créativité, à trouver une nouvelle passion comme soupape de sécurité. Sa période de deuil fut celle où il commença à altérer son apparence drastiquement. S'il ne pouvait être tel qu'il l'avait désiré professionnellement, on ne pouvait lui ôter la liberté de s'exprimer autrement.
Sa mère avait mis près de 6 mois à sortir de son coma. 6 mois durant lesquels Jude était allé la voir tous les jours, fleurissant sa chambre au point où on ne savait plus quoi faire des bouquets. Chaque fois que l'un d'entre eux tombait en décrépitude, il le remplaçait immédiatement par un nouveau. Après tout, les fleurs au Pays-Bas, ce n'est pas ce qui manque. L'annonce de son réveil allégea d'abord l'âme de Jude, avant de finalement l'alourdir à nouveau. Bien que présente physiquement, sa mère était une sorte de coquille vide pour laquelle il était difficile de s'exprimer et de se déplacer. Le seul à qui elle arrivait encore parfois à dire quelques mots était son fils. Assidûment, il l'avait faite placée dans une clinique privée et continue de la voir tous les jours. Jude a cependant décidé d'exprimer son angoisse au sujet de sa mère en la surprotégeant.
Personne ne sait qu'elle a survécu, qu'elle est sortie de son coma. Il a joué de son réseau pour faire en sorte que le nom de sa mère ait rejoint celui de son père au cimetière. Elle est enregistrée sous un faux nom dans sa clinique. L'idée qu'on puisse à nouveau lui faire du mal, ou l'utiliser comme moyen de pression à son égard est insupportable au jeune O'Brien. Il ne laisse rien ni personne à part le corps médical l'approcher. Il va jusqu'à changer quotidiennement ses horaires de visite pour ne pas créer de schéma à repérer. Légère paranoïa d'un esprit profondément marqué par la destruction soudaine du havre dans lequel il s'était construit. Le climat social, loin de s'arranger à Amsterdam, ne faisait qu'aggraver les anticipations sombres de Jude.
CHAPITRE SIX : OWL
Est-ce que 2032 ne serait finalement pas pire que 2012 ? La guerre intestine que se vouent les familles était un poison suffisant pour les amstellodamiens. Fallait-il encore qu'un autre trouble vienne faire peser lourd la balance du côté de l'insécurité ? O, W, L. On n'entendait plus que ces trois lettres sur toutes les bouches du réseau Eindhoven. Jude regardait les choses de loin, faisant son travail en espérant secrètement qu'au lieu de nouveaux conflits, la disparition soudaine de leur patriarche puisse favoriser les alliances. Même si son pragmatisme lui murmurait à l'oreille qu'il serait bien plus lucratif de voir le sang couler. Cœur de chair, ou cœur de pierre, il n'avait de toute façon pas son mot à dire dans l'histoire.
Tant que la famille lui assurait une stabilité financière et une certaine sécurité... il pouvait bien composer avec quelques soubresauts. Tout le monde était plutôt habitué aux différentes rixes, après tout. Mais là, quelque chose était différent. Le nouveau patriarche de la famille, Elijah, était loin de faire l'unanimité, encore moins quand celui-ci se retrouva fortement diminué et qu'une partie du clan prit le large. Violence encore, violence toujours, les rues sont presque infréquentables de nuit à présent tant les tensions sont fortes. Jude lui, n'a pas bougé de sa position. Calme et attentif, le jeune homme ne sait vers où le vent pourrait le porter si la tempête devient trop forte.
L'opportunisme coule depuis un bon moment dans les veines des O'Brien. Toute leur lignée le crie depuis 1845, et même au-delà. Ce gêne implacable circule bien évidemment dans le système de Jude, l'irrigant et l'animant depuis qu'il a respiré pour la première fois. Loyal tant que la brise se fait douce, tant que les choses vont dans son sens... le jeune O'Brien lui-même n'est pas capable de savoir quel chemin prendra sa vie dans les mois à venir. Il n'apprécie pas particulièrement d'avoir perdu la maîtrise de son destin au moment même où sa famille a accepté de travailler pour les Eindhoven... mais il faut bien manger, non ?
L’endroit est sombre, très sombre. A vrai dire, il n’y a aucune lumière, et je ne sais absolument pas comment j’ai la capacité de voir cette porte en pin devant moi. Bien évidemment, je suis familier avec l’endroit, ce n’est pas la première fois que je viens ici. A chacun de mes pas, je vois des ondes se former, comme si je marchais à la surface d’un lac surplombant un abysse sans fond. Si la porte est là, c’est que je dois sortir à nouveau. Si la porte est là, c’est que j’ai le droit à une entrevue. Debout sur les eaux, sur fond d’un ciel noir d’encre, elle trône, immobile. Sa poignée ronde n’attendant que d’être tournée. De mes doigts fins et tatoués, je l’empoigne. Son déclic familier résonne à mes oreilles, j’esquisse un faible sourire.
‘Long time no see.’ Voilà ce que j’ai envie de dire à celle qui est en face de moi, assise à une table en chêne massif, sur une chaise toute aussi rustique. L’odeur de l’endroit n’a absolument pas changé : boisée, sucrée, épicée et poudrée. La pièce ressemble au salon confortable de ce qui pourrait être un hybride entre un cottage anglais et un trou de hobbit. Son chien à la mine débonnaire dort sur un épais tapis, près du feu, pendant qu’elle semble réfléchir, les coudes posés sur la table, la tête dans ses mains. Le silence est parfait, ponctué seulement par le craquement des buches dans la cheminée à foyer ouvert.
Même si elle a pris quelques années depuis la dernière fois… on ne peut pas vraiment dire qu’elle ait changé. Ses cheveux courts en bataille sont toujours les mêmes, ses lunettes beaucoup trop grandes pour son visage aussi. Ses habituels traits tirés l’accompagnent, de même que cet air de quelqu’un à qui on a arraché bien trop de plumes en peu de temps. Mon auteure est là, devant moi. Celle qui connait tous mes secrets, celle qui m’a donné vie pour ensuite me la reprendre tant de fois. Elle courbe mon destin à ses exigences, et moi, je m’y plie peu importe l’endroit où elle souhaite m’envoyer. Je prends place en face d’elle, tandis que ses yeux noisette se plantent dans mes rubis :
« Owl. » J’acquiesce silencieusement, l’observant alors qu’elle se lève pour aller mettre une théière sur la gazinière.
« Jasmin, je suppose ?
- Tu supposes bien, me dit-elle de sa voix fatiguée.
- Pas de monstre cette fois ?
- Pas de monstre cette fois. »
Bien, ça me fera des vacances. Le parfait silence s’étirait à nouveau, jusqu’à ce que la théière se mette à siffler, faisant grimacer et jurer entre ses dents mon auteure. Elle s’empressa d’éteindre le feu, d’attraper deux bols à thé et de venir nous servir dans l’ordre habituel : moi, puis elle. Dans un bruit caractéristique de céramique, nos deux contenants vinrent s’entrechoquer comme si nous nous apprêtions à descendre un shot de tequila. Les verres de la jeune femme s’embuèrent alors qu’elle tentait de refroidir son breuvage.
« Je suppose que si je suis là, c’est que tu as été trop factuelle.
- Dans le mille, Jude. Tu sais ce qui t’attend donc ?
- D’intimes confessions, d’interminables questions, l’obligation d’être à cœur ouvert.
- Exactement. »
Je ne suis pas particulièrement enchanté de me plonger dans l’aspect émotionnel, psychologique et chaotique de tout ce qu’elle a prévu pour moi dans ma nouvelle aventure. Elle a le don de m’envoyer dans des endroits où j’en vis constamment des vertes et des pas mûres. De ses mains sèches et abîmées à toutes les saisons, elle me tend un papier sur lequel figurent une foule d’interrogations sur des thèmes divers et variés relatifs à mon histoire personnelle. Les passant en revue rapidement, je pris une gorgée de thé avant de poser le document sur la table. De ma voix grave, un rictus étrange et à peine perceptible se mit à habiller mon visage :
« Curiosité mal placée. En quoi ça les regarde ? (Mon ton se fit plus incisif).
- Tu sais bien que c’est la règle pour entrer sur chaque nouveau terrain de jeu.
- Cette règle est aberrante.
- Tu dois t’y plier. Ne crois pas que ce soit une partie de plaisir pour moi, t’as autant d’amabilité qu’une murène, déclara-t-elle.
- Merci pour le compliment.
- De rien. »
Le blanc qui suivit, lourd et pesant, tendu et crépitant, ne fut brisé que par le craquement brutal et sonore d’une bûche qui fit jaillir une gerbe d’étincelles en dehors du foyer. Réveillant le chien dans un sursaut, celui-ci se contenta de bailler avant de soupirer et de se rendormir. Nous nous regardions, moi avec agacement, elle avec lassitude, jusqu’à ce que finalement… je sois le premier à l’ouvrir, désireux d’expédier l’exercice le plus rapidement possible. Même si, dans mon cas, je parlerais plutôt de torture, soyons honnête.
« On commence par quoi, chef ?
- L’enfance, pardi. Comment c’était, chez toi ?
- Normal ? Tu veux que je me base sur quoi pour répondre, sérieux… soupirais-je.
- Donne-moi tes impressions, décris-moi un peu ton cadre familial… donne moi deux trois faits, je sais pas… Bref, raconte-moi ta vie un peu, que j’aie matière à travailler. C’est vraiment pas le moment d’être laconique.
- C’est toujours le moment d’être l… AÏEUH. »
Mais c’est qu’elle venait de m’envoyer une de ses claquettes Décathlon à la gueule, celle-ci ! Purée, j’ai failli en renverser mon thé, sacrilège. Je me frottais le nez et le front en grommelant alors qu’elle replaçait ses lunettes sur son nez en levant un sourcil inquisiteur :
« Tu comptes t’y mettre pour aujourd’hui ou pour demain, Monsieur O’Brien ?
- Tyran.
- Je sais. Crache le morceau.
- Ok, ok, roulais-je des yeux en reprenant une gorgée de thé au jasmin pour me mettre les idées en place. Je pense que j’ai eu une enfance on ne peut plus normale. J’ai eu des parents aimants, généreux, sans être gâté non plus malgré mon statut d’enfant unique. Ils avaient une certaine sagesse dans leur manière de voir la vie qui m’inspirait beaucoup. Toujours prêts à travailler dur s’il le fallait, ils suivaient leurs ambitions et allaient au bout sans sourciller. Notre famille a toujours été globalement proche. Cousins, cousines, oncles, tantes, grands-parents… on avait l’habitude de se réunir régulièrement. Après les inondations en revanche, les choses ont changé. Une grande partie de la tribu a mis les voiles hors d’Amsterdam pour tenter de se reconstruire ailleurs. Mes parents ont refusé d’abdiquer. Je pense que moralement pour eux, ça a été très dur de tout perdre, mais ils n’ont jamais rien montré.
- Comment tu le sais alors ?
- Simplement parce que je les ai vu faire un choix terrible et désespéré : travailler pour les Eindhoven. Ils ont mis leurs scrupules de côté, leurs principes à la benne pour pouvoir sauver ce qu’ils avaient repris à nos ancêtres et continué de construire.
- Mmmh… et ta vie sociale en dehors de ta famille ?
- Je m’entendais bien avec les fils des voisins, des jumeaux que tout le monde jugeait insupportables mais que j’aimais bien. Ils étaient vraiment étranges, tout le temps dans leur monde. Mais… ils m’y avaient fait une place et me partageaient leurs intérêts pour l’exploration, et l’aventure. Je pense que c’est eux qui m’ont donné envie de dessiner ce que je voyais et vivais.
- Et à l’école ?
- J’ai toujours été un élève qui n’avait pas besoin de bosser des masses pour avoir des notes acceptables. J’étais plus réservé dans le cadre scolaire, trop d’enfants d’un coup sûrement. J’avais peut-être un ou deux amis… mais je changeais régulièrement de cercle malgré moi. Je n’ai jamais été très doué pour être le moteur dans les relations, ni pour les maintenir.
- Sans déconner… »
La claquette Décathlon fit un vol retour en direction de la face de mon auteure, qui m’avait vu venir et esquiva de justesse. Trop prévisible, sans doute. De mon air d’autoroute, je la fixais sans broncher en attendant la suite de son petit interrogatoire auquel elle semblait prendre autant de plaisir qu’à récurer ses chiottes.
« Bref, on va faire comme si on n’avait rien vu, hein. Vis-à-vis de l’entreprise familiale, tu avais envie de reprendre ou pas ?
- Hein ? Je croyais pourtant que c’était suffisamment clair, ce point. Je l’ai pourtant dit que je n’avais rien contre.
- Développe.
- Sérieux… ?
- J’ai l’air de plaisanter ?
- Je ne sais pas t’as une drôle de tronche tout le temps donc…
- … Tu t’es vu ?
- Je suis parfait.
- Eh beh on n’est pas sorti de l’auberge. Tu comptes me répondre ou pas ? »
Honnêtement, à cet instant précis je me suis retourné pour voir si y avait moyen de prendre la porte en sens inverse. Sans grande surprise, les menuiseries en pin avaient disparu. J’étais coincé dans cette pièce sans aucun moyen de pouvoir m’évader. Un soupir passa la barrière de mes lèvres et je me servis à nouveau du thé pour parachever le supplice de patience que je lui infligeais.
« L’idée de reprendre l’entreprise familiale me semblait naturelle. J’ai toujours été intéressé par l’activité de mes parents et les responsabilités qui allaient avec. Je trouvais ça génial de pouvoir avoir un tel patrimoine à exploiter, une véritable chance, un destin tout tracé.
- Alors pourquoi t’as fait autre chose ?
- Parce que j’étais curieux d’exploiter d’autres possibilités avant que ce soit mon tour de prendre les reines. Mes parents attendaient juste de moi que je m’épanouisse. Ils auraient certainement été tristes si je leur avais dit que je ne voulais rien savoir de la thanatopraxie, mais ne m’auraient pas rejeté pour autant. Ils ont toujours supporté et encouragé mes choix. D’autant que je leur avais fait cette promesse de prendre le relais le moment venu. On se fait confiance, chez nous. Donc oui, j’avais envie de reprendre l’entreprise, mais mes parents n’ont jamais placé d’espoir démesuré en moi. Le choix que j’ai fait de leur promettre de faire vivre leur affaire était en pleine liberté et sans contrainte aucune.
- Tu étais plutôt proche de tes parents du coup ?
- Oui. Nos relations étaient excellentes. Mon père a toujours été bon déconneur à sortir des dad jokes toutes les deux secondes, toujours présent pour les galères matérielles mais avec l’intelligence émotionnelle d’une huitre. Ma mère, plus sérieuse et calme, a toujours été un soutien pour moi. Je pouvais tout lui confier. Je n’étais pas un enfant roi pour eux, quelque chose qu’on met sur un piédestal ou qu’on enferme. J’étais un individu à part entière qu’ils voulaient aider à grandir, et je pense qu’ils ont plutôt réussi leur mission. »
Mon auteure me regardait maintenant d’un air étrange, à la fois grave et légèrement amusé. Je la vis lentement approcher ses mains des miennes pour les saisir et les tenir fermement. Elle maintint un silence pesant durant lequel je sentis le malaise monter. Qu’est-ce qu’elle allait bien pouvoir me demander encore… ? Pourquoi elle faisait ça exactement ? Quand est-ce que je rentre à la maison… ? Et alors, je me mis à écarquiller les yeux avant de les baisser, fixant la table d’un air las :
« C’est le moment n’est-ce pas ?
- Oui, Jude. La question fatidique.
- Vas-y qu’on en finisse.
- Es-tu encore puceau ? »
Je roulais à nouveau des yeux en dégageant mes mains, soupirant un peu trop fort pour évacuer ma gêne. Sérieux, elle était obligée d’amener les choses de cette manière ? Il a vraiment intérêt à être bien ce nouveau terrain de jeu, parce que là je suis en train de tout donner.
« Non, je ne suis pas puceau.
- Ils grandissent si vite… dit-elle dans un étrange aparté comme si je n’étais pas là, essuyant une larme invisible au coin de son œil.
- T’es grave…
- Et toi, t’as une réservite aigüe.
- Touché. Je suppose que tu veux que je te déballe ma vie sentimentale ?
- Bingo.
- Ok euh… par où commencer… ?
- La liste est si longue ?
- Ben… disons que pendant les études supérieures… je n’ai pas été très calme à ce niveau-là.
- VRAIMENT ?
- Fais pas comme si ça te choquait… Au fait, t’as un cendrier ? J’ai envie de m’en griller une.
- Yep, fit-elle en me tendant celui qui trônait sur une étagère non loin de la table.
- Merci. Hum, bref… (J’allumais ma cigarette de mon vieux briquet en argent, tirant dessus pour qu’elle commence à se consumer efficacement.) Donc, j’ai eu pas mal d’aventures pendant les études supérieures. Soirées obligent, alcool oblige… drogues aussi par moment… il y a forcément eu des épisodes où les choses ont dérapé. Ce n’est pas une période où j’ai été très sérieux. Il faut dire que mon amour de lycée m’aura bien réduit le palpitant en miettes.
- Ah oui ? Raconte.
- Elle s’appelait Fiona. Blonde, les yeux bleus, magnifique. Une fille discrète malgré sa beauté. Elle ne cherchait pas particulièrement la popularité, encore moins l’amour. Mais bon, on s’est retrouvé un jour à devoir bosser ensemble sur un projet et moi ben… comme un con je suis tombé amoureux d’elle à mes 16 ans. Visiblement, au début c’était réciproque puisqu’on est resté ensemble jusqu’à la fin du lycée. La relation était plutôt sérieuse, nos familles respectives s’étaient rencontrées, tout le monde nous voyait passer notre vie collés l’un à l’autre.
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Elle s’est inscrite dans une fac différente de la mienne. Elle voulait apprendre le droit et moi la médecine. Si Utrecht était réputé pour ma spécialité, pour la sienne il fallait qu’elle aille ailleurs. Au début, on s’était dit que la distance ne serait pas un obstacle, puis elle a déconné. De mon côté je n’envisageais pas autre chose qu’elle, mais Fiona avait d’autres plans. Elle a rencontré un autre gars qui lui correspondait visiblement mieux et m’a trompée pendant plusieurs mois avant de finalement cracher le morceau plutôt que sortir des excuses pour ne pas me voir les weekends.
- Ça ne m’étonne pas, tu as toujours été loyal. Donc tu as couru les jupons pour noyer ton chagrin ?
- On peut dire les choses ainsi, oui.
- Et maintenant, il en est quoi de ta vie sentimentale à New Amsterdam ?
- Toujours rien de sérieux. J’enchaîne les coups d’un soir depuis mon retour. Je commence à m’en lasser. Je ne suis pas satisfait de ma situation, et pourtant… je me sens coincé par la vie d’adulte dans laquelle j’ai du mal à faire des rencontres.
- Legit. Tu veux un câlin ?
- … Non. »
Ma vie n’est finalement pas très originale. Un gars banal dans une famille banale avec des problèmes banals. Il n’y a que mon boulot qui dénote… et mon apparence. Je ne sais pas si ça doit me réjouir ou me déprimer de faire un tel constat. Un adulte parmi tant d’autres à New Amsterdam, esclave d’une famille de mafieux pour maintenir son niveau de vie… Je fis un rond de fumée avant de venir écraser mon mégot dans le cendrier.
« Je vais devoir continuer sur les sujets désagréables.
- 2012 ?
- 2012.
- Tu veux savoir quoi ?
- Tu l’as vécu comment ?
- Ben j’étais déçu de pas pouvoir continuer d’aller à l’école. J’aimais apprendre.
- Nan mais… en dehors de ça.
- De quoi ?
- Tu me fatigues… Tu peux pas juste me parler un peu de ce que vous avez vécu avec votre famille ? T’as eu peur à ce moment-là ? Je veux dire, t’avais 12 ans ça a dû être impressionnant, non ?
- Ah ! Euh… ben oui. Forcément j’ai eu peur. Mes parents m’ont cherché d’un coup dans ma chambre pour me faire sortir en urgence alors que l’eau montait dans la maison. Je n’ai pas eu le temps de récupérer grand-chose à par mon livre préféré et la peluche que je me traînais depuis ma naissance. On a été rapatriés dans une grande salle avec d’autres personnes victimes des eaux. Et quand ces dernières se sont mises à gronder, elles ont balayé notre maison et les locaux de l’entreprise comme si ça n’avait été qu’un simple château de sable. On a tout perdu ce jour-là. J’ai eu beaucoup de chance car j’ai été épargné des visions de cauchemar imposées par le phénomène. On était dans une zone plus reculée qui a eu le temps de voir venir le problème et de se mettre en sécurité.
- Le cul bordé de nouilles, quoi.
- Je n’irais pas jusque-là.
- Dis-moi, rabat joie, comment vous vous êtes retrouvés sur le territoire Eindhoven ?
- Mes parents, tu veux dire. Ils se sont rapidement portés volontaires pour aider sur les lieux les plus touchés. Ils m’ont confié à nos voisins pendant leurs absences. J’étais souvent fourré avec les jumeaux à cette période. Petit à petit, mes parents allaient plus loin dans Amsterdam avec les groupes de bénévoles, d’où le fait qu’ils se soient retrouvés confrontés aux Eindhoven.
- Logique imparable.
- Toujours.
- Ou pas.
- …
- Donc, pas hyper traumatisé par l’évènement du coup ?
- Plus marqué que traumatisé. Je m’en souviendrais toute ma vie, c’est certain, mais je n’ai pas l’impression de souffrir d’un stress post-traumatique quelconque.
- Dit-il alors qu’il vit dans une péniche prête à prendre le large au moindre problème.
- … Tu marques un point. »
Peut-être que sans m’en rendre compte, à la manière dont j’ai surprotégé ma mère depuis l’incident, je me construis un environnement bien contrôlé pour palier toute catastrophe. Elle me fait réfléchir, mon auteure. Et j’avoue que je n’aime pas trop ça. Je préfère de loin mes mensonges pour me croire invincible, inébranlable et paré à tout.
« Le reste de ta famille ne vit plus à New Amsterdam actuellement, c’est bien ça ?
- Tout à fait. Ils ont quitté la ville dès qu’ils l’ont pu après la catastrophe, comme je te le disais plus tôt. Nos liens avec eux se sont étiolés depuis. On s’envoie encore régulièrement des nouvelles, mais ils ne souhaitent pas revenir à la capitale. Les rumeurs des conflits et mafias qui y règnent suffisent à leur donner envie de rester planqués dans leur coin. Je pense que dans quelques temps… on finira par ne plus se contacter du tout.
- La tristitude.
- Un peu, je regrette la période où on se retrouvait tous ensemble. J’ai l’impression que tout s’est complètement effondré depuis les inondations et le drame qu’ont vécu mes parents.
- Je suppose, te connaissant, que tu fais bonne figure sur fond d’angoisse.
- Oui. Je fais comme si je maîtrisais tout, mais en réalité, les choses me glissent entre les doigts, et je suis plus seul que jamais. »
Mon auteure vida son bol de thé à présent froid. Elle regarda un instant l’âtre, puis son chien sans rien ajouter de plus. Je savais qu’il était à présent temps d’entrer dans la danse. Les discussions étaient terminées, à mon grand soulagement. J’allais pouvoir retourner à mon statut d’individu secret et mutique sous peu. Elle est la seule avec qui je me permets d’être aussi ouvert, qui ne le serait pas avec son créateur ? Peut-être trouverais-je quelqu’un pour prêter oreille à mon histoire à sa manière à New Amsterdam ? La méfiance est pour l’instant la seule chose que m’évoque cet endroit de chaos et de débauche. Je vais m’y mêler tel un caméléon, mon destin aux mains de mon auteure et de ses partenaires. J’y serai une proie pour l’imagination, impossible maintenant de fuir. Alors que je me lève pour sortir du salon, main tendue vers la poignée de la porte en pin sur laquelle trônent désormais les lettres O-W-L, elle m’interpelle une dernière fois :
« Tâche de ne pas mourir trop vite.
- Dit-elle alors qu’elle me jette dans la gueule du loup.
- Pour une fois que ce n’est pas l’inverse… »
Un faible rire s’échappa de ma gorge, et je sortis de la pièce sans un mot de plus. Me voici dans New Amsterdam, dont le ciel gris et l’air humide semblent me coller à la peau d’une façon bien désagréable. Je crois qu’il s’agit là du pire endroit dans lequel elle m’a traîné. Etrangement, je ressens un soupçon d’excitation à l’intérieur de mes tripes. Je vais bientôt découvrir à quelle sauce je vais être mangé.
Rowan Feys
Merci pour ta fiche Jude
Avant de te valider, on a des petites questions à te poser. On te laisse y répondre dans ta fiche et nous prévenir quand c'est fait :)
Ces questions ont pour visées d'éclairer des zones qui ne le sont pas pour nous, ou pour approfondir des endroits qui seraient intéressants à développer pour toi !
Elles concernent toutes son histoire. Rien à dire sur le caractère et le physique, tout est clair \o/
Comment était son enfance à Jude ? Avait-il il des amis à l'époque ? A t il été choyé et chouchouté en tant que fils unique (ou a-t-il eu des frères et soeur ?) ? On voit très bien comment était l'entreprise à l'époque mais qu'en est-il de Jude ? Sa famille mettait-elle de l'espoir en lui ? Avait-il envie de reprendre l'entreprise ?
On parle souvent de "Famille O'Brien" mais sans vraiment nommer les liens familiaux. Y'avait-il des grands repas de famille ? Quelle était la place de Jude dans cette famille ? A-t'il noué des relations avec certains membres plus que d'autres ?
Ca manque aussi de relations amoureuses ! En a-t-il eu ? Si oui :qui ? que? quoi ? Si non : pourquoi ?
C'est quoi son ressenti des inondations (en dehors du fait d'avoir pas pu faire ses études et être déçu) ? A-t-il était traumatisé ? S'est-il senti chanceux que lui et ses parents soient en vie ? A-t-il perdu des membres de sa famille ou des amis ?
Est-ce qu'ils ont perdu leur maison ? Leur biens ?
Voilà, c'est beaucoup de questions mais globalement autour de trois sujets. Les questions ont pour viser de t'aider à développer, afin que ton personnage soit plus facile à appréhender. Dis-nous quand tu as modifié
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Félicitations, ta fiche a été validée par les membres du staff ! C’est à partir de maintenant que ton aventure commence au sein de OWL.
Tu es ainsi membre de la famille des Eindhoven ayant le rang de Lieutenant.
Tu retrouveras tous les liens dont tu peux avoir besoin pour t’ancrer dans l’univers du forum juste en dessous. En espérant que tu t’amuseras avec nous !
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