Musique et Wanhoop sont de grands amis

Le plan en soit n'est pas complexe. On a décidé de ne pas attaquer, et de remettre d'aplombs la Famille.
Je sais que mon père aimait les prostituées Maaeirs, mais si je peux me permettre, aller en voler chez Katrijn n'est pas la meilleure idée. C'est le meilleur moyen pour se faire infiltrer par la Famille des De Jonckheer. Les conséquences des impulsivités de mon père arrivent aujourd'hui : Katrijn reprend du terrain. Elle a la mainmise sur notre Casino, qui était un lieu phare pour nos transactions de drogue, et notre parc nous est difficilement accessible. A nouveau, notre parc était un point central de trafic. Les prostituées Wanhoop étaient d"excellentes dealeuses. Elles proposaient toujours un petit joint à leur client, d'abord gratuit, puis ils devenaient accros. Le prise de stupéfiant était alors associée au rapport avec la prostituée, et cela renforçait un sentiment de dépendance envers elle. Une fois que ce sentiment était créée, la drogue devenait soudainement payante.
Ne plus avoir accès au parc, c'est une sacré baisse de profit et de pouvoir pour les Wanhoop.

Tout ça, c'est le sous-boss de la banlieue, Stefaan, qui me l'a évoqué il y a deux semaines. C'est un homme au profil calme. Il est assez âgé - trop pour mes goûts - mais il s'entretient. Il émane de lui une aura de vieux sage des films japonais, un peu comme un senseï. Il est l'un des rares à être assez serein par rapport à la situation, et il approuve notre décision de faire profil bas.
On a donc établi un plan, il y a deux semaines, pour reprendre l'avantage sur ce qui nous appartient : on commence par le parc. L'idée c'était de tisser un lien avec les prostituées, d'identifier leurs faiblesses, de chercher une faille dans leur système, s'assurer que si nos prostituées reviennent elles ne seront pas en danger.
Pour cela, hier, un des soldats est venu me faire un rapport de mission : un certain Juul Boersma serait devenu en très peu de temps un client assidu de ces dames. Il pourrait être un premier pont vers ces dernières, et nous pourrions profiter de son statut rapproché pour l'enrôler et qu'il puisse nous aider à défaire ce réseau.

Je me suis proposée d'aller à la rencontre de Juul. Elijah est mort il y a trois semaines, il est temps que j'assume, pour reprendre les conseils d'Aevyn.

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En suivant les réseaux sociaux du groupe de musique de Juul, on a découvert qu'il performait ce soir au "Dernier Bar avant la Fin du Monde". C'est un lieu emblématique du quartier : il fait la frontière entre la zone résidentielle et la banlieue. Il fait l'angle de deux rues, dont la séparation est terrifiante de différenciation. Sur la gauche, la zone résidentielle : la rue est dégagée, propre, les lampadaires fonctionnent. Au loin, on perçoit la ZUP. De l'autre côté, un sillon noir, dont l'odeur d’égout nauséabonde nous fait une première mauvaise impression. Un lampadaire sur deux fonctionne, instaurant un climat malsain. Des silhouettes sont tapies dans l'ombre. Sûrement des sans-abris.
Et en parfaite séparation de ces deux mondes, comme un portail magique, le Dernier Bar avant la Fin du Monde. Une devanture en bois usée. Cependant, des guirlandes festives accrochées ici et là détournent l'attention du public des lacérations sur le devant.

J'ai voulu m'apprêter comme pour un concert. J'ai étudié un peu le style de musique, mais il est difficilement identifiable. J'ai l'impression que c'est quelque chose d'alternatif ? J'ai donc mis un pull de mon père, un grand beige, avec l'encolure qui porte des motifs léopards. Le pull est si grand qu'il m'arrive aux genoux. J'ai donc mis des collants. Les manches tombent, alors je les aies retroussées.
J'ai essayé de me maquiller, mais ce n'est pas un domaine que je maîtrise. Pour le teint, je n'ai que du blush, pour le reste tout est rose. Je me suis contentée alors de mon maquillage signature : du blush à ne plus pouvoir, du mascara et du gloss.
Je porte des bottes sans talons pour affronter la neige, un bonnet et une écharpe. J'aurai dû mettre un manteau, les températures sont glaciales dehors. Dans la rue, je suis passée devant une école, avec une affiche de Katrijn. Elle financerait une école publique du secteur. Quelqu'un a taggué le visage de la maire et lui a mis des cornes et une moustache. Un Wanhoop je suppose. Ça m'a un peu fait rire.

J'arrive au Bar, et je pousse la porte. Je m'attendais à un public en délire, mais le concert a commencé depuis dix minutes et nous sommes sept dans la salle. Il n'y a que deux personnes qui écoutent le concert, les autres semblent surtout concentrés dans un jeu de cartes. Ils paraissent même dérangés par la musique.
Je m'installe à une table au premier rang. Tandis que je retire mon attirail pour affronter le froid, je commande en chuchotant une bière. Je suppose que le public viendra au fur et à mesure. Il faut avouer que le bar n'a pas une super réputation non plus ...

A la fin du concert, je me mets debout et applaudit vigoureusement. C'était franchement pas mal. Juul a une voix mélodieuse, assez particulière. Elle dénote avec ce qu'on a l'habitude d'entendre. Je me suis surprise à apprécier et à hocher la tête par moment.
Je les laisse finir de ranger les instruments, puis je m'approche de la scène. Proche de Juul, je l'interpelle :

- Bonsoir, c'était un super concert, je lui souris.

Je n'ai jamais recruté personne. Quelle démarche je pourrais faire ? Puis je me souviens de l'aspect festif de ma nouvelle famille, et j'ai une idée.

- Je peux t'offrir un verre ?, je lui demande, d'une voix douce.